Olav Westphalen

09.06.2012
Olav Westphalen — Galerie Georges-Philippe & Nathalie Vallois

An Art Collector in a Frying Pan
2012
Encre et acylique sur papier
56 x 76 cm

Est-ce la première fois que tu utilises le mécanisme du « Gag Master » dans ton travail ?

Je l’ai déjà utilisé dans des workshops et pour créer des cartoons. C’est un outil créé au début du 20ème siècle par une ou un groupe de personnes anonymes. Cet outil mécanique permet aux dessinateurs de composer plusieurs dizaines de milliers de situations différentes pour créer des bandes dessinées. Sa mécanique engendre des situations comiques très banales. Le titre du projet est une des situations aléatoires que j’ai obtenue. Mais le titre de l’exposition aurait pu être : « Un Employé de bureau sur la lune en train de perdre sa dignité », « Steven J. Hawkins dans un sauna exagérant énormément », « Votre Psychiatre en enfer en plein crise de jalousie », « Le Pape au lit, curieux », « Un Galeriste chez le médecin, frugal », « Un Banquier à la télévision incapable de faire un choix », « Un Touriste à un mariage jouant l’ignorant », « Un Exhibitionniste dans une galerie, l’ordre des chose est inversé », « Un Bébé à des funérailles incapable d’accepter les coutumes », « Un Vendeur aux Pays-Bas distrait», « Carla Bruni dans un sous-marin utilisant des animaux et des humains pour des tâches inappropriées », « Un Concombre sur la Tour Eiffel, affichant d’extrêmes bonnes manières ». Mais j’ai préféré le premier : « Un Drogué dans une forêt se compliquant la vie ». Vous pouvez imaginer beaucoup d’autres situations drôles, dans lesquelles un drogué dans une forêt pourrait se rendre les choses difficiles…

Pendant l’exposition, le « Gag Master » ne peut plus être utilisé. Est-ce que tu essayes de montrer au visiteur une nouvelle manière de penser pouvant être appliqué en dehors de l’exposition?

Le « Gag Master » est composé de trois cercles concentriques. Le cercle extérieur présente des « personnages types » et le cercle suivant décrit des « situations banales » – Les deux étant assez stéréotypés. Le cercle central est plus intéressant car il est constitué de vingt-cinq relations ou situations. Les choses s’inversant, des objets communs sont ainsi utilisés à des fins inhabituelles. Il existe en fait, vingt-cinq différents types de situations comiques, elles sont proches de l’idée de Freud du « jeu de mot », elles viennent de l’expérience et s’imbriquent les unes aux autres de manière non systématique. Pour ma part, c’est la chose intéressante que propose cet outil tout en ayant tendance à créer un humour assez banal et prévisible. J’ai essayé de l’utiliser en tant que dessinateur de bande dessinée pour m’amuser, mais je me suis rendu compte que j’étais meilleur sans lui. Je l’ai ensuite utilisé dans des cours ou des « workshops » lorsqu’il était question de collaboration, le « Gag Master » est en fait une forme mécanique de « cadavre exquis ».

L’un des principaux mécanismes pour créer une situation comique est la « (re) combinaison ».
Vous avez devant vous tous ces sujets et vous les assemblez jusqu’à ce que quelque chose de drôle se produise. Souvent les choses drôles sont celles auxquelles vous n’auriez pas pensé tout seul. Je pense que les artistes fonctionnent également de cette manière dans leurs ateliers, avec leurs propres matériaux. Il existe de nombreux concepts, attitudes et intentions dans l’art, surtout aujourd’hui. C’est comme si les gens collaient des choses ensemble en essayant de trouver une façon qui les surprennent et leur plaisent et à laquelle ils n’auraient pas pensé avant.
Bien sûr, le « Gag Master » n’est jamais du pur hasard. Dans un sens, c’est un genre d’autoportrait. Je choisis d’utiliser les éléments appartenant à un grand réservoir de connaissances populaires.

Le « Gag Master » produit deux types différents de dessins : la plupart sont dans la veine des bandes dessinées et quelques autres sont plutôt proche du réalisme photographique.

Il y a deux groupes différents issus d’un même processus. Un système peut générer un certain type de travaux. Les outils à ma disposition me dictent ce que je peux faire. J’ai pensé qu’il était important de ne pas produire que des dessins de type bandes dessinées. Au final beaucoup de ces dessins deviennent des œuvres à part entière, questionnant la peinture et l’image qu’elle représente. Ces dessins questionnent un certain type de peinture importante à la fois dans son histoire et de nos jours. Pour la série des dessins plus « photographiques », ils avaient d’autant plus de sens pour moi qu’ils se rapportaient à des célébrités. J’ai le sentiment que tout le monde partage ce genre d’images ; une carte postale de Susan Saradon est aussi présente dans notre conscience collective qu’un dessin-« cartoon » représentant un touriste américain.

L’utilisation de couleurs primaires et de différentes textures dans vos dessins est-elle une référence à différents mouvements picturaux ?

Oui, je pense que cela fait référence à des notions très primaires de l’abstraction. Si vous pensez à l’abstraction géométrique au début du 20ème siècle, ils utilisaient des couleurs primaires. En jouant de cela, à un certain point, les éléments plus narratifs, figuratifs ou même textuels sont aussi traités comme des éléments abstraits. Si vous réunissez ces divers éléments ensemble, par exemple un psychiatre et un lieu, et s’ils deviennent des éléments d’une image, alors pourquoi ne pas y ajouter une couleur expressive ? La façon dont la couleur est appliquée est aussi assez mécanique. J’ai simplement posé des piles de feuilles ensemble par terre et peint des traces presque mécaniquement avec un très gros pinceau, utilisant les différentes couches de papier. Certaines traces semblent volontaires alors que d’autres sont aléatoires. Elles sont traitées exactement de la même manière. Vous vous demandez si l’artiste laisse une trace expressionniste ou applique la peinture sans réelle intention artistique. Génie ou industrie? Dans un sens, je ne pense pas qu’il y ait beaucoup de différence. Beaucoup de blagues composées avec le « Gag Master » ne seront pas réellement drôles même si elles constituent techniquement de bonne plaisanteries, de même, beaucoup de traces que je réalise en peinture ne sont pas bien réalisées, pourtant elles restent peintes sur du papier, elles sont donc des peintures.

Quel prolongement imagines-tu pour le « Gag-Master » dans ton travail ?

J’ai apporté le Gag Master en Chine la semaine dernière, avec les personnes avec lesquelles j’ai travaillé il nous est venu l’idée de l’utiliser pour composer 30 000 positions sexuelles différentes !
Je ne sais pas trop, mais ça pourrait être intéressant.


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