Vue de l’exposition « Gilles Barbier »
Galerie GP & N Vallois, Paris
20.09 – 26.10.2013
© JcLett
Gilles Barbier
La recette du festin
2013
Crayon et acrylique sur calque polyester
112 x 330 cm
Gilles Barbier
Pig Fala kassermaelan Push 2
Série Dessin noir
2013
Gouache sur papier
123 x 189 cm
Gilles Barbier
Habiter la viande
2013
Crayon et acrylique sur calque polyester collé sur papier
28 x 21 cm
Gilles Barbier
Still Memory 3
2013
Technique mixte
50 x 35 x 32 cm
Gilles Barbier
Still Memory 2
2013
Technique mixte
Environ 100 x 60 x 60 cm
Gilles Barbier
Le Festin
Détail
2013
Technique mixte
165 x 390 x 115 cm
Vue de l’exposition « Gilles Barbier »
Galerie GP & N Vallois, Paris
20.09 – 26.10.2013
© JcLett
Gilles Barbier
Le Festin
Détail
2013
Technique mixte
165 x 390 x 115 cm
Gilles Barbier
Le Festin
Détail
2013
Technique mixte
165 x 390 x 115 cm
Vue de l’exposition « Gilles Barbier »
Galerie GP & N Vallois, Paris
20.09 – 26.10.2013
© JcLett
Gilles Barbier
Still Memory 1
2013
Technique mixte
30 x 60 x 60 cm
Gilles Barbier
Still Woman
2013
Technique mixte
164 x 265 x 160 cm
Gilles Barbier
Still Man
2013
Technique mixte
136 x 180 x 113 cm
Gilles Barbier
Guéridon aux Volailles
2013
Technique mixte
103 x 78 x 65 cm
Vue de l’exposition « Gilles Barbier »
Galerie GP & N Vallois, Paris
20.09 – 26.10.2013
© JcLett
Gilles Barbier
Console au Canard
2013
Technique mixte
130 x 75 x 47 cm
Gilles Barbier
Le Village
2013
Crayon et acrylique sur calque polyester collé sur papier
112 x 105 cm
Gilles Barbier
Still Memory 6
2013
Technique mixte
58 x 70 x 64 cm
Gilles Barbier
Still Memory 7
2013
Technique mixte
56 x 40 x 50 cm
Gilles Barbier
Still Tongues
2013
Technique mixte
32 x 39 x 50 cm
Parmi les grandes surfaces inexplorées, avant le cosmos et le fond des océans, c’est sans doute le fond de nous-mêmes qui reste le territoire le plus lointain. Nous en sommes tous, à des degrés divers, des géomètres, des mesureurs, des inspecteurs, mais seule une petite délégation a reçu l’autorisation d’aller y plonger les deux mains, pour en ramener une boue mystérieuse. Les artistes, ces scaphandriers de l’inconscient, nous leur confions par principe et depuis au moins trente mille ans la lourde responsabilité de nous ramener, à chaque fois que cela est possible, quelque chose venant à peu près du fond de l’existence.
Gilles Barbier n’est pas un débutant dans la profession, il a même l’étoffe des héros, ceux qui n’ont pas peur de se coltiner les symboles, les poncifs et les démons personnels.
Quelque chose de végétatif
On ne s’étonnera donc pas de retrouver à nouveau le corps de l’artiste, moulé, dans cette technique populaire et hyperréaliste que Gilles Barbier affectionne. Mais pourquoi toujours utiliser son propre corps, au risque d’un engloutissant narcissisme ? Pour Barbier, la réponse est avant tout technique, et relève d’une réalité d’atelier : c’est parce que son propre corps, cette forme qui vieillit, il l’a toujours sous la main. Il sait lui donner rapidement l’attitude recherchée, sans avoir à diriger un hypothétique modèle. Le moulage lui permet ensuite de ne pas avoir à interpréter. Il y a toujours un tiers qui s’occupe d’interpréter le corps : c’est le temps*.
Ce rituel de l’empreinte de sa propre forme plastique, Gilles Barbier le pratique depuis de nombreuses années. C’est une performance physique, mais qui s’effectue dans le retrait, l’immobilité et la concentration. Quelque chose de la sculpture classique, de la pose. Ce temps long est littéralement présent dans la série des Still People (2013), où l’homme se présente dans une position assise, méditative, étrangement envahi par des mousses, du lichen, des champignons mycorhiziens, du lierre et d’autres plantes grimpantes. Une sculpture “romantique” que l’on interprétera à souhait, selon sa dimension autobiographique d’hommage à la pratique elle-même, sa dimension métaphorique d’un homme comme retiré de son époque, ou encore symbolique : celle d’un être réconcilié qui laisserait pousser sur lui-même l’anarchie de ce qu’il a domestiqué et asservi depuis plusieurs siècles. Accompagné dans l’exposition de son double féminin, “ophélien”, on ne peut pas faire l’impasse sur les récits, grands ou petits qui ressurgissent ici : Adam et Eve bien sûr, la Belle au Bois Dormant, Tristan et Iseult pourquoi pas, puisqu’il s’agit tout de même de mettre ces personnages en relation, en tension, avec une immense table à victuailles. Gargantuesque festin hyperréaliste* trônant au centre de la galerie. Ici, sur ce banquet où l’oeil ne se repose jamais* ont poussé de petites architectures blanches, aux formes épurées. Comme pour les Still People, on y retrouve des temporalités différentes qui s’affrontent, se recouvrent, s’entremêlent. Le temps de la chair, du pourrissement imminent sert de fondation au temps long de l’architecture. Au fond, cette exposition pourrait constituer une longue méditation sur les différentes perceptions du temps, leurs intrications, leurs dynamiques, leurs affrontements. Les nouvelles pièces présentées ici s’inscrivent dans la famille de celles** qui, dans l’œuvre de Gilles Barbier, abordent cette idée de vivre, construire, pousser sur un socle éphémère, mouvant, vivant.*
L’exposition présente en contrepoint une nouvelle série de dessins, qui sont à envisager comme des instantanés de ce que nous montrerait un périscope surgissant dans l’inconscient de l’artiste. Une sorte de journal de bord, une matière magmatique, soupe où bouillonnent différents morceaux qu’on retrouve plus ou moins développés dans l’espace des sculptures ou des installations. La plupart du temps, ils sont parcourus de bulles, de phylactères ou de sentences qui influencent la lecture de l’œuvre, mais qui n’agissent jamais comme une explication. Peut-être plutôt un “monitoring” de l’activité de l’artiste, une fixation monochrome et figurative de la matière noire de l’inconscient, des images en guise de Ça, structurées comme un langage*. Gilles Barbier les envisage d’ailleurs comme un dispositif articulé, une sorte de grammaire dont les règles varient selon l’espace qui les accueille.
Cette série, commencée en 2003, fait partie du terreau sur lequel pousse le travail* : un moule sans limite, en quelque sorte.
* les phrases marquées d’un astérisque sont des citations de l’artiste
** L’Hospice, Vieille Femme aux tatouages, The Game of Life, Les maisons construites dans les bonsaïs…